Sophie Roquelle du Figaro, bien placée pour parler des assisté(e)s

Publié le par Batiste

Le nom de Sophie Roquelle ne vous dit probablement rien... Ce n'est pas très grave, il ne mérite pas d'être retenu. J'avais tout de même envie d'en parler sur ce blog, qui n'a guère été animé ces temps-ci, faute de temps à lui consacrer. [1] Mais ne nous égarons pas. Puisque mon article lui est dédié, penchons-nous sur cette Une du Figaro Magazine... Qui va sans doute vous permettre de cerner un peu mieux cet obscur personnage :

 

http://lesitedumexicain.free.fr/blog/assistanat/figaro.png

 

Sophie Roquelle, c'est l'une des journalistes propagandistes qui ont permis à cet infâme torchon de publier une telle couverture le week-end dernier. C'est en effet une prétendue « enquête » rédigée par cette dame — « La France des assistés » (consultable en intégralité ici) — qui a servi d'alibi au Figaro Magazine pour se livrer à ses penchants les plus vils. Présenté comme une « enquête édifiante », cet article consiste en réalité en une compilation de clichés, tous plus ridicules et plus fallacieux les uns que les autres, sur ce que la famille Le Pen et leurs disciples de l'UMP aiment à appeler « l'assistanat ». Si vous souhaitez en savoir davantage sur cette catégorie de population fictive, dont l'univers « se résume à un gros sofa face à un immense écran plat » et pour qui « le travail n'est plus qu'un vieux souvenir », alors je vous en recommande la lecture.

 

Décidément, le mythe du chômeur paresseux et incapable de se prendre en main a la dent dure... Mais Sophie Roquelle aide à dépasser les clichés, montrant que certains « assistés » parviennent à surmonter leur passion de la sieste pour effectuer des démarches administratives, ce qui leur permet de cumuler des quantités vertigineuses de prestations sociales... L'amalgame est vite fait entre le nombre d'aides perçues par « les assistés » et le nombre d'aides que versent les différents organismes. Le constat de « Bertrand Nouel, expert à l'Ifrap, un think-tank libéral » — il fallait au moins ça — est accablant : il existe « 11 sortes de prestations familiales légales (...), sans compter la liste incalculable des aides locales ! ». Sophie Roquelle rajoute que « les conseils généraux accordent en moyenne 16 aides différentes », sans préciser le montant de ces prestations, qui peut les toucher et pourquoi. Seul compte le chiffre, puisqu'il permet d'insister sur leur nombre (de toute évidence trop important), tout en laissant entendre que ces aides sont cumulables. « Quant aux communes, elles distribuent des sommes certes modestes (souvent inférieures à 200 € par an), mais de toutes sortes ». Notre enquêtrice préférée admet pour une fois que le montant de ces aides est dérisoire, mais insinue à nouveau qu'il est possible d'en additionner beaucoup.

 

Les assistés, en plus d'être des cumulards, s'en mettent plein les poches : « on peut bénéficier d'un complément de RSA jusqu'à 2755 euros de revenus mensuels ». Dans un prochain article il faudra que Sophie Roquelle nous explique comme s'y prendre pour parvenir à une telle somme, histoire de nous enlever quelques doutes... Il semblerait toutefois que l'on puisse lui faire confiance, car elle est une véritable spécialiste en matière d'assistanat et autres abus de la générosité publique. Non seulement parce qu'elle en a fait son fond de commerce — comme en attestent ses rares contributions « journalistiques » [2] —, mais aussi parce qu'elle fait partie de ceux qui profitent le plus des largesses octroyées par l'État français... Je fais évidemment allusion aux contribuables les plus riches qui, du fait des nombreuses mesures prises en leur faveur ces dernières années, nous coûtent bien plus cher que tous ces feignants-de-chômeurs-même-pas-foutus-de-trouver-du-boulot, dont l'existence est nécessaire au bon fonctionnement du système capitaliste.

 

Cette chère Sophie Roquelle est en effet l'épouse de Jean-François Cirelli, numéro 2 de GDF-Suez, qui a défrayé la chronique en avril 2009, lorsque les médias ont annoncé l'augmentation de son salaire annuel, alors triplé pour atteindre la coquette somme de 1,3 millions d'euros. Autrement dit, cette dame se permet de pointer du doigt des gens censés profiter du système, qui vivent bien au-dessous du seuil de pauvreté, tandis que son mari gagne plus d'un mois de RSA par jour... Et il ne contribue malheureusement pas à l'effort de solidarité nationale à la hauteur de ses moyens, puisque les riches n'ont jamais bénéficié d'autant de largesses qu'aujourd'hui.

 

Si la mesure du revenu maximum proposée par le Front de Gauche était appliquée, ce M. Cirelli reverserait au minimum chaque année 968 000 euros au pot commun, soit l'équivalent de 173 années de RSA, voire de la création de 40 postes supplémentaires d'enseignants, pour ne prendre que ces exemples. Cet argent serait aussitôt réinvesti dans l'économie de notre pays, puisque seuls les plus fortunés peuvent se permettre de faire des placements et/ou de spéculer. Et ce qu'ignore visiblement Sophie Roquelle, c'est que la plupart des « assistés » consacrent une bonne partie de leur RSA à financer le scandaleux salaire de son mari... Du moins ceux qui parviennent encore à régler leurs factures de gaz à la fin du mois.

 

 

Je me demande si l'on gagne bien sa vie lorsqu'on est payé pour « enquêter » sur les squatteurs de canapés, confortablement installé dans son fauteuil d'époque Louis XVI... Visiblement, Sophie Roquelle n'a aucune idée de ce que signifie le fait de vivre sous le seuil de pauvreté. Il aurait fallu qu'elle sorte de son château, de temps à autre, pour être en mesure de comprendre ce que vivent au quotidien les « assistés ». En même temps, l'exercice n'était pas simple. Car elle en côtoie bien des précaires, Sophie Roquelle, mais tous ont su trouver des emplois. Domestique, c'est un métier d'avenir... Il y a de plus en plus de demande, et c'est toujours mieux que d'être au chômage.

 

 

Notes :

 

[1] Et pourtant, ce ne sont pas les sujets potentiels qui ont manqué ! Vous avez (notamment) échappé à des billets sur : la mort de Ben Laden et l'étrange conception de la justice promue par les Zétazunis, les buzz très éphémères et sans intérêt — faute de l'absence totale de fond — de la "Brigade anti-négrophobie", l'appel des blogueurs « Unité 2012 » ou les misères de la politique 2.0... Ou encore à un coup de gueule consacré aux prises de position politiques de Stéphane Hessel, que j'avais l'intention d'intituler « De l'indignation chez l'autruche », mais dont je n'ai pas encore trouvé le temps d'achever la rédaction.

 

[2] Voir la liste de ses articles sur le site du Figaro : http://plus.lefigaro.fr/page/sophie-roquelle

 

 

Liens à consulter :

- "La journaliste du Figaro et les assistés" (chronique de Daniel Schneidermann - 08/06/11).

- "Droit de réponse : "La France des assistés" de Sophie Roquelle (...)" (billet d'humeur - 05/06/11).

- "Le «Fig Mag» matraque les «canapés»" (Libération.fr - 09/06/11).

-"Cinq idées reçues sur "l'assistanat"" (LeMonde.fr - 10/05/11).

-"Oui, l'assistanat est une réalité en France !" (blog - 11/06/11).

 

 

Modification du 14/06/11 : rajout d'un lien à consulter.

Publié dans Critique des médias

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